QUAND MARIE-CHANTAL GARENNE DERAPE…

Lorsque j’étais jeune, nous nous moquions gentiment des « Marie-Chantal », ces jeunes filles de bonne famille un peu compassées ! Mais, du moins, les « Marie-Chantal » de cette époque étaient bien élevées et ne proféraient pas de propos indécents (celle que j’ai côtoyé du moins, je n’ai pas la prétention de les connaître toutes!).

Force est de constater que, dans l’époque troublé que nous vivons, les choses ont changé.

Voici les propos qu’a tenu Madame Marie-Chantal GARENNE, candidate suppléante sur le canton de Niort Ouest (oui, canton 2, OK, je n’arrive pas à me faire à ces numéros!) à une habitante qu’elle a rencontré en ville : « ça ne m’étonne pas que Zabatta et Léonard soient devant nous dans le bureau xx(1) au Clou-Bouchet : ce sont tous les cas sociaux et les noirs qui votent pour eux ».

J’imagine que Madame GARENNE, pensant connaître cette personne et imaginant qu’elle était de droite (voire, à son idée, de la droite dure ?), a pensé que cette subtile réflexion lui permettrait de marquer des points et inciterait son interlocutrice à aller voter pour elle au second tour dimanche prochain. Mauvaise pioche ! Il se trouve que cette personne serait plutôt de centre gauche et les propos de Madame GARENNE l’ont scandalisé… au point de venir me les retranscrire (bien que je la connaisse fort peu).

Alors que dire ??

Commençons par le commencement : le Front National et ses idées m’ont toujours fait horreur. Je respecte totalement leurs électeurs, quels qu’ils soient, parce que je pense qu’il s’agit plus de gens déboussolés, en perte de repères et qui, comme un illusoire recours se tournent vers les thèses simplistes du Front National.

Mais se sont bien leurs idées qui me font horreur, ces idées qui visent à cliver, à stigmatiser à monter des populations les unes contre les autres. On retrouve cette idée sous-jacente dans les propos de Madame GARENNE : pourquoi ces noirs et ces « cas sociaux » (quel mot !!!) voteraient-ils à gauche plutôt que pour Madame GARENNE et ses colistiers ? Mais c’est bien sûr, on voit vite la logique : c’est parce que la gauche c’est les aides sociales, le RSA, l’assistanat,… bref, tout ce dont « ces gens-là » (air connu…) profitent et qui nous coûte si cher… pas vrai ma bonne dame ?

Procédé indécent et dangereux que je ne peux pas laisser passer…

Alors que faire ?

La forme que je vais employer maintenant (extrêmement connue), je ne l’aurais jamais employé pour une controverse municipale sur un sujet courant. J’ai trop de respect pour un certain nombre de grands hommes (Zola, Hugo, Jaurès, Clémenceau, Mendès-France, Badinter, et d’autres…) pour ne pas « singer » la forme de leurs grands combats historiques lorsqu’il ne s’agit que de sujet relevant du débat municipal courant. Mais ici, ce dont nous parlons, c’est de l’attitude d’une élue qui utilise délibérément le mépris d’autrui (et en l’occurrence des plus faibles et de gens d’origine étrangères) à des fins électoralistes. Voilà qui rappelle d’autres situations actuelles ou passé, ce qui suscite ma colère et justifie que je le dénonce et m’y oppose avec la plus grande vigueur.

Alors, n’étant ni journaliste, ni écrivain, vous m’excuserez si j’appelle à mon secours un grand écrivain pour me prêter main forte sur la forme (pour le fond, je n’ai besoin de personne et je l’assume personnellement et intégralement, ça va de soi).

Allons-y :

J’accuse, Madame Marie-Chantal GARENNE d’avoir tenu les propos cités, que je rappelle « ça ne m’étonne pas que Zabatta et Léonard soient devant nous dans le bureau xx au Clou-Bouchet : ce sont tous les cas sociaux et les noirs qui votent pour eux. ».

J’accuse, Madame Marie-Chantal GARENNE, sous couvert de propos prétendument sans conséquence, de professer des idées qui sont la porte d’entrée vers les idées du Front National, dans ce qu’il a, pour moi, de plus détestable c’est à dire les penchants racistes d’un certain nombre de ses sympathisants et son mépris (aujourd’hui caché mais réel) des pauvres gens qui sont poussés par la misère à quitter leur pays pour rechercher des conditions de vie plus acceptables.

J’accuse, Madame Marie-Chantal GARENNE non pas de partager les idées du Front National (du moins je l’espère, je ne la connais pas suffisamment pour en juger), mais, ce qui est peut-être pire encore de tenir délibérément, par cynisme politique, un discours « musclé » dans l’espoir de s’attirer les grâces des 14% d’électeurs du Front National présents sur son canton. Voilà, en plus, une forme de mépris de ces électeurs frontistes qu’elle prend pour des gogos en espérant que cette récupération politique insincère(1bis) sera efficace dans les urnes dimanche.

J’accuse, Une partie (minoritaire, je le crois et surtout je l’espère !) de cette droite qui s’affiche sans étiquette de flirter avec certaines thèses du Front National et, ce qui est pire, de le faire en laissant croire par leur communication publique qu’ils sont modérés et défendent des idées respectables.

J’accuse, Monsieur Jérôme Baloge (que je ne soupçonne pas un instant d’avoir, quant à lui, ce genre de propos même en privé) d’avoir, dans sa stratégie municipale « attrape-tout », constitué sa liste en y faisant place à des personnes comme Marie-Chantal GARENNE (dont il doit forcement connaître, au moins un peu, les idées : quand on fait ensemble une campagne politique, on se parle…) et qui sont capables de tenir ces propos.

Pour être bien clair sur mon état d’esprit en écrivant ces lignes, je vais tout simplement reprendre les propos que j’avais tenu lors de la séance d’installation du Conseil Municipal pour réagir à l’entrée, pour la première fois, d’un élu du FN dans l’assemblée municipale. J’avais dit :

«  Je respecte chaque personne dans cette assemblée, et je respecte les idées de tous… à l’exception, notable, des idées de Monsieur Charbonneau : je ne respecte pas vos idées monsieur Charbonneau parce qu’elles ne sont pas respectables. Et vous aurez beau les enrober d’un habillage propret qui les rend malheureusement acceptables aux yeux de certains de nos concitoyens, elles restent des idées d’exclusion, de rejet de l’autre et de haine. Cela, je m’y opposerai toujours et avec la plus grande vigueur. »

Je suis exactement dans le même état d’esprit aujourd’hui envers Marie-Chantal GARENNE : je la respecte en tant que personne pour une raison essentielle, une raison de principe, c’est que rien de ce qui est humain ne m’est étranger (2) . C’est la raison pour laquelle je continuerai à saluer Madame GARENNE et je n’hésiterai pas à parler avec elle avec l’espoir de la faire changer d’opinions. Mais c’est pour cette même raison, parce que «  rien de ce qui est humain ne m’est étranger », que je ne peux pas tolérer que soient stigmatisés les plus pauvres, les étrangers, les plus défavorisés de notre société.

Qui plus est, Madame GARENNE comme moi-même sommes, au Conseil Municipal, élus « au nom du peuple français » (c’est le cas de tout élu, y compris dans une collectivité locale). Dans ma conception de ce qu’est un élu de la République, cela donne des responsabilités, notamment celle de respecter ses concitoyens dans leur diversité : comment être au service de tous les habitants sinon !?
C’est la raison pour laquelle je juge avec sévérité ces propos que d’aucun tenteront sûrement de faire passer pour dérisoire : ils ne le sont pas. On sait bien que les idées les plus nauséabondes commencent à s’implanter lorsque, dans les discussions de tous les jours (les « propos de bistrot » serais-je tenté de dire, mais ce serait discourtois pour les bistrotiers(3) !) on accepte tous ces petits glissements sémantiques, toutes ces petites dérives dont chacune, prise séparément, semble insignifiante, mais qui, toutes ensemble forment un terreau fertile et très efficace pour ceux dont le seul objectif et de monter les français les uns contre les autres.

Pour ceux qui ne seraient pas convaincus, je vous invite à lire ou à relire « Matin Brun » de Franck Pavloff…

matin_brun

 

Étant donné que nous sommes dans le cadre d’une campagne départementale, il va de soi que j’ai reproduit ces propos aussitôt que je les ai connu, non pas par volonté de favoriser les candidats de gauche, mais pour deux raisons :

  • d’une part parce qu’il me semble indispensable que les électeurs soient informé des véritables idées des candidats pour lesquels ils votent, surtout lorsque ceux-ci ont pour stratégie d’avancer masquer. Une fois qu’il sont informés, libre à eux de choisir qui ils veulent et je respecte tous les votes (même s’il en est que je ne comprends pas!)
  • D’autre part, parce que les principes d’équité du débat dans la période électorale impose, logiquement, qu’un élément nouveau pouvant avoir une incidence sur l’élection ne soit pas mis sur la place publique au dernier moment (par exemple un vendredi soir à 20h, la campagne se finissant le vendredi à minuit). Nous sommes Jeudi après-midi, les amis de Madame GARENNE ont donc le temps de me répondre, même par voie de presse s’ils le souhaitent.

Complément : par ailleurs, immédiatement, je m’engage à ce que toutes les réponses ou commentaires sur ce sujet que les amis de Madame GARENNE pourrait envoyer sur le site de « l’Observatoire du Balogisme » soient publiées (excepté bien sûr si elles comportent elles-même des propos racistes, antisémites, homophobes ou infamants). C’est pour moi une question de transparence et d’honnêteté.

Pour finir, comme disait ZOLA (quelle ironie qu’une école de ce Clou-Bouchet si multiculturel – dont parle Madame GARENNE – porte son nom!),… je préfère lui laisser vraiment la parole car je n’ai pas son style merveilleux et inimitable… et lire du ZOLA permet de finir cet article sur une note positive (la littérature est une arme contre les inégalités, mais elle est aussi un plaisir!) :

« En portant ces accusations, je n’ignore pas que je me mets sous le coup des lois qui punissent les délits de diffamation. Et c’est volontairement que je m’expose. Quant aux gens que j’accuse (…) je n’ai contre eux ni rancune ni haine. Ils ne sont pour moi que des entités (…). Et l’acte que j’accomplis ici n’est qu’un moyen révolutionnaire pour hâter l’explosion de la vérité et de la justice.
Je n’ai qu’une passion, celle de la lumière, au nom de l’humanité qui a tant souffert et qui a droit au bonheur. Ma protestation enflammée n’est que le cri de mon âme. Qu’on ose donc m’attaquer en justice et que l’enquête ait lieu au grand jour ! J’attends. »(4)

Pour le plaisir (ça nous fera du bien…), le texte intégral de ZOLA peut être lu ici, sur le site de l’Obs (https://tempsreel.nouvelobs.com/societe/20060712.OBS4922/j-accuse-par-emile-zola.html), le fac-similé de l’Aurore du 13 janvier 1898 (https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/a/aa/J%27accuse.jpg)… et un autre j’accuse qui ne parle pas de la même chose et qui (évidemment!) est moins beau que celui de ZOLA, mais qui parlera peut-être aux plus jeunes d’entre vous (https://www.youtube.com/watch?v=oqaiH8iBZ5g). Ces artistes nous aiderons à nous détendre un peu après tout cela (oui, ce genre de propos me mettent toujours en colère,… heureusement!).

Signé :

Amaury BREUILLE

Conseiller Municipal

4 Impasse Poncelet

79000 NIORT

(1) Je n’ai pas retenu le numéro du bureau du Clou-Bouchet dont il était question.

(1bis) Cela dit, ce dernier mot serait plutôt une circonstance atténuante de mon point de vue : je préfère que Madame GARENNE soit insincère en l’occurrence !

(2) J’aurais bien aimé que cette phrase soit de moi ! Malheureusement, Térence l’a écrite bien avant moi, il y a 2178 ans (!) : « Homo sum ; humani nihil a me alienum puto »  (L’Héautontimorouménos)

(3) Quoique les bistrotiers ne soit pas responsables de ce que disent leurs client !!

(4)Le texte original de Zola disait « Qu’on ose donc me traduire en Cour d’Assises (…) », je l’ai modifié car il n’était pas approprié à la circonstance. L’auteur n’étant plus là pour s’en plaindre, ce sont donc les lecteurs que je prie de m’excuser. Cela dit, l’idée générale reste bien la même : j’attends avec impatience que Madame GARENNE (ou quiconque) ait ce minimum de courage qui consisterait à m’assigner pour diffamation. J’attends mes juges sereinement…

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